La geek attitude

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La geek attitude

Messagede vallauri le 15 Jan 2008, 22:39

L'Express du 22/08/2005

Tendance

La geek attitude

par Julien Bordier

C'est la nouvelle tribu high-tech, celle des accros à l'ordinateur et aux joujoux numériques dernier cri. Une passion exclusive et un mode de vie qui ne les éloignent jamais de leur clavier. Apprenez à les reconnaître.

Les geeks (prononcez «guiks»), ces envahisseurs venus de la galaxie Techno, sont parmi nous. Ils n'ont pas de raideur anormale à l'auriculaire, comme dans la série télé, mais parlent un drôle de jargon: «Le N70 est vraiment trop petit, je préfère le 6680»; «Et toi, t'as quoi comme distrib'? Debian ou Ubuntu?» De quoi se sentir aussi largué que le cycliste du dimanche tentant de suivre la roue de Lance Armstrong. Ils ont leurs mots codés, leurs rituels, leurs journaux, leurs snobismes, leurs références cultes: les geeks sont ces pionniers du high-tech et de l'informatique, ces accros aux machines électroniques qui ont tout compris avant tout le monde et s'initient déjà aux outils que vous autres, pauvres communicants débutants, achèterez dans trois ans. En anglais, geek signifie «zarbi, allumé». Au départ, dans les années 1980, le sobriquet désignait les informaticiens plutôt marginalisés. En 2001, le magazine Wired baptisait même geek syndrome la montée de l'autisme dans la Silicon Valley. Aujourd'hui, le mot définit les dingues de technologies.

«Quand je vois une jupe à 70 euros, je me dis que c'est le prix d'une demi-carte mémoire»

Les uns, «codeurs», ne peuvent s'empêcher, face à leur ordinateur, de concevoir compulsivement des programmes informatiques. Les autres, early adopters, font le siège des fabricants pour décrocher en avant-première les derniers modèles d'appareils ou de gadgets numériques: cet automne, par exemple, il «faut» avoir une powerball - sorte de balle de tennis dotée d'un gyroscope - et le Motorola A1000, un téléphone qui fait à la fois lecteur vidéo, baladeur MP3, GPS, boîte mail et appareil photo. Les geeks ont leurs petits cercles. Les meilleurs endroits pour découvrir les joujoux de l'année avant tout le monde, ce sont les Fanny's parties, rendez-vous bimestriels des technophiles et gadgetophiles parisiens qu'organise depuis deux ans Fanny Bouton, 33 ans, qui se présente comme geek girl. «La PlayStation portable [PSP], la console dernier cri de Sony, est sortie au Japon le 12 décembre 2004, raconte-t-elle. Trois jours après, à notre soirée, nous y jouions déjà, alors qu'elle ne sera disponible en Europe que le 1er septembre 2005.» Posséder le Graal technologique du moment - le chien-robot il y a cinq ans, le lapin intelligent Nabaztag aujourd'hui - est pour certains une question d'honneur. Les plus maniaques passent commande au Japon et à Hongkong, pays servis en premier, ou font des kilomètres pour être à l'avant-garde. Xavier des Horts, directeur de la communication de Nokia France, raconte: «L'an dernier, nos revendeurs suisses ont reçu un mobile huit jours avant l'Hexagone. Des Français ont pris le train pour acheter ce téléphone avant les autres. Certains fans de la marque parviennent même à obtenir les nouveaux produits avant moi!»

Le petit décodeur

Noobs ou newbies


«Ce sont les petits nouveaux, les bizuts, raconte Régis Bigot, sociologue au Crédoc. Souvent moqués par les experts, les geeks, quand ils présentent fièrement leurs achats alors qu'ils sont déjà démodés.»

Noobzor

«Eux, c'est pire, explique Régis Bigot. Ce sont des noobs qui se font passer pour des geeks sur les forums!»

Troll


Participant à un forum qui cherche à détourner malicieusement le sujet de la discussion pour générer une polémique, souvent interminable. Par extension, le troll désigne aussi le message provocateur: «Mac, c'est mieux que Windows» est un classique. «Debian, c'est mieux que Mandriva» fait un carton auprès des informaticiens. Pour les non-initiés, cela revient à affirmer crânement: «Paris, c'est mieux que la province.»

Gigot


Un gigaoctet.

Point Godwin


Lorsque la discussion dégénère et que l'un des interlocuteurs a recours aux insultes, elle atteint alors le point Godwin. La loi, énoncée en 1990 par Mike Godwin, fait partie du folklore du Net. En gros, plus une polémique dure, plus la probabilité d'y trouver une comparaison avec les nazis ou avec Hitler s'approche de 1.

Les fabricants surveillent de près les réactions de ces défricheurs et leur prêtent des appareils. «Les early adopters ont de l'influence sur le destin d'un modèle, via les commentaires très détaillés qu'ils postent sur les blogs ou les forums», souligne Thomas Le Gourrierec, rédacteur en chef du magazine spéinterdité Stuff. La téléphonie 3G, par exemple, a bénéficié des remarques pertinentes de ces cobayes consentants. Internet est évidemment le carrefour des geeks. Tous possèdent un pseudo sur la Toile et échangent des programmes, des infos, des astuces ou des conseils.

«Quatre jours sans connexion et je deviens fou», avoue Benjamin Soontag, 28 ans, informaticien. Les geeks sont tous des drogués. Premier geste au saut du lit: allumer les ordinateurs. «Je ne peux pas me déconnecter du monde plus de dix minutes par jour», raconte Célia, 26 ans, son téléphone qui fait aussi PDA (assistant personnel) à la main. «Un geek sort sans arrêt son portable, demande partout où se trouve la prise Internet», explique Frédéric Couchet, 35 ans, délégué général d'un gros vivier de geeks, l'Association pour la promotion et la recherche en informatique libre. «C'est génial, ce sont des fous de boulot, s'écrie David, l'associé de Benjamin. En revanche, je n'aimerais pas être la copine d'un geek.»

Copinedegeek.com: le site existe, justement. Aux manettes, Coralie Couchet et ses amies. Avec humour, elles chroniquent les us et coutumes de la tribu des programmeurs-codeurs, dont elles dressent le portrait-robot: cheveux longs, barbe, tee-shirts aux messages abscons, jeans, baskets ou sandales allemandes, l'été. Une assemblée composée à 98% de mâles entre 20 et 35 ans, diplômés, qui apprécient la bière - Guinness de préférence - et boulottent des pizzas, «plus faciles à manger d'une seule main pendant qu'on tape au clavier», explique l'un d'eux. Conséquence: le geek est légèrement enrobé et blanc comme un cachet d'aspirine. Le geek a toujours «un truc à finir» sur son ordi après le dîner. «Ma passion m'a coûté ma copine», reconnaît Christophe, 30 ans. Homo numericus est donc célibataire. Mais pas solitaire, ni asocial, contrairement à la variante extrémiste des férus d'informatique qu'on appelle nerds. Il a pour livre de chevet Le Guide du voyageur galactique. Une «trilogie en cinq volumes» de Douglas Adams, un auteur de science-fiction, dont l'adaptation cinématographique vient de sortir sur les écrans sous le titre H2G2. Le Guide du voyageur galactique. Dans ce manuel, le superordinateur Deep Thought répond - après 7,5 millions d'années de calcul - à «la grande question sur la vie, l'univers et le reste». Verdict: «42»! Le calculateur ajoutant: «Reste à déterminer précisément les termes de la question.» La sentence gaguesque et sibylline - donc culte - s'affiche désormais en gros caractères sur les tee-shirts.

L'ère d'Homo numericus

A l'heure des blogs, du MP3 et de la 3G, nous sommes tous des geeks en puissance. Une récente enquête du Crédoc confirme la pénétration des nouvelles technologies de l'information dans la vie de nos concitoyens. 56% des Français sont familiarisés avec le micro-ordinateur, 50% se sont déjà connectés à Internet et 67% disposent personnellement d'un téléphone mobile. Les magazines consacrés aux appareils mobiles gagnent entre 10 et 15% de lecteurs chaque année. Une génération entière se prépare à entrer dans l'âge adulte en maîtrisant déjà tous ces outils. Et si les geeks étaient tout simplement la version bêta - en phase de test, pour employer leur vocabulaire - d'Homo numericus, l'homme de demain?

Avec les geeks, rien n'est simple. «Ils sont comme les Shadoks, toujours à la recherche de la complexité», plaisante David. «Regarder un DVD prend des proportions insoupçonnées, raconte Coralie. Le geek veut absolument lire le film à partir de son ordinateur pour le visionner sur la télé. Seulement, les branchements ne fonctionnent jamais. Le comble, c'est qu'au-dessus de la télé on a une boîte noire qui s'appelle un lecteur DVD et qui fonctionne très bien.» Bidouiller, démonter, améliorer les performances de leurs programmes ou de leurs appareils, telles sont les activités des geeks. «Ils adorent quand leur système plante et que le dialogue s'installe alors avec la machine», observe Philippe Breton, sociologue au CNRS (Le Culte de l'Internet, La Découverte).

«J'achète cinq ou six ordinateurs par an»

Le vice du numérique coûte cher. «Quand je vois une jupe à 70 euros, je me dis d'abord que c'est le prix d'une demi-carte mémoire, affirme Fanny Bouton, l'entremetteuse de geeks. Un technophile débourse en moyenne entre 200 et 400 euros par mois.» Une fois les doigts posés sur les touches, c'est l'engrenage. Pierre, 40 ans, commercial dans l'agroalimentaire à Dieppe, est un techno addict. «J'ai un ultraportable Sony VAIO et, comme PDA, un iPAQ hx2750», dit-il en sortant de son sac un second PC, un Toshiba Libretto U100 d'une valeur de 1 850 euros. «Je dépense 1 500 euros par mois en high-tech, poursuit-il. Je change d'assistant personnel tous les mois et demi et j'achète cinq ou six ordinateurs par an.» Pour suivre le rythme et s'acheter de nouveaux joujoux, le Dieppois revend très vite. «A l'échelle temporelle du geek, deux mois, c'est déjà très long», souligne Laurent Pavoine, créateur de Mageekstore.com, une boutique en ligne de gadgets techno. «C'est une course sans fin, précise Pierre. C'est seulement la banquière qui t'arrête.» Ou la batterie, à plat.

Source : http://www.lexpress.fr/info/high-tech/d ... 434461&p=1
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